Salut Antoine,
En biologie, il est souvent impossible de généraliser. Dans ce cas précis, tout dépend des papillons dont on parle! La vision colorée diffère selon leur phylogénie (histoire évolutive) ou les traits d’histoire de vie des groupes considérés. Comment savoir par quoi sont attirés les insectes ? Les expériences passent par des observations comportementales ou de la biologie moléculaire (étude des pigments photorécepteurs).
Un set de base de récepteurs sensibles aux UV, au vert et au bleu, forment la base de la vision trichromatique chez les insectes. La plupart des espèces de Lépidoptères possèdent des récepteurs UV, bleu et vert (voir figure). Le changement le plus commun dans l’arsenal de récepteurs des insectes semble être l’évolution de récepteurs sensibles au rouge en plus du set ancestral UV/Bleu/ Vert, apparemment indépendamment d’une pression sélective commune.
Dans Adriana et Al, 2001Seul un faible nombre d’espèces d’Hyménoptères ont des récepteurs sensibles au rouge, alors que ce type de récepteurs est beaucoup plus commun chez les papillons. Les récepteurs au rouge sont apparus séparément au moins dans quatre branches au sein de ce phylum (chez les Noctuidae, chez quelques papillons diurnes et deux fois chez les Nymphalidae). Parfois le récepteur rouge a été perdu, comme chez les Nymphalidae qui ont tous une activité diurne.
Le mode de vie diurne ne semble pas être nécessaire à la présence des récepteurs rouges. Le moro-sphinx butineur
Macroglossum stellatarum n’en possède pas alors que le nocturne
Spodoptera exempta en a.
De plus il ne faut pas oublier que les yeux des papillons sont des yeux composés (somme de petits « yeux » appelés ommatidies), ce qui complique encore un peu la chose… Les deux papillons
Lycaena heteronea and
Lycaena rubidus possèdent le même set de pigments photorécepteurs mais leur distribution à travers l’oeil diffère selon l’espèce.
L. heteronea a une coloration d’ailes bleue et possède des récepteurs bleus dans la partie ventrale de l’œil en plus des trois autres types. Chez
L. rubidus, l’aile réflechit et dans l’UV et dans le rouge, et l’espèce ne possède pas de récepteurs bleus dans l’œil ventral. Ainsi, l’expression du gène codant pour le pigment bleu dans cette partie de l’œil serait dirigée par l’occurrence d’un signal sexuel bleu
L. heteronea.
En plus de ça, il existe un dimorphisme sexuel dans la distribution des photorécepteurs dans la partie dorsale de l’œil. Alors que les mâles des deux espèces précitées ont une vision dichromatique bleu/UV, les femelles ont des récepteurs additionnels sensibles au rouge. Ceci a été interprété comme étant une adaptation à la détection des feuilles rouges des plantes hôtes sur lesquelles pondent les femelles.
Quelques lectures:Adriana D. Briscoe, A.D., Chittka, L., 2001. The evolution of color vision in insects. Annual Review of Entomology, 46:471–510.
Stavengaa, D.G., Arikawab, K. 2006. Evolution of color and vision of butterflies. Arthropod Struct Dev. 2006 35 (4): 307-18.